Victor Fleutre

Âgé de 28 ans, Victor Fleutre a commencé à grimper à Amiens dans une petite salle du centre ville en janvier 2013. Il accroche alors tout de suite avec la grimpe. Six mois après, il rencontre Julien Gromez, ouvreur chez Arkose. C’est lui qui l’a initié à l’ouverture en 2013. Avant spécialisé dans la revente de pièces pour voitures, il a décidé d’arrêter totalement cette activité pour partir au Québec en 2018. Ce départ a eu lieu grâce à sa rencontre avec un ouvreur québécois en grimpant à Fontainebleau. Ce fût sa première aventure à l’étranger. L’occasion pour lui de voir ce qui se passait de l’autre côté de l’Atlantique.
SNAP : Quelle est la différence dans le métier d'ouvreur entre la France et le Canada ?
Victor : “Au Canada, le métier est plus récent qu’en France. La grimpe en intérieur est moins inculquée culturellement contrairement à la France. Au Canada, ils sont proches des Yosemite, de plein de trucs, ils ont une culture de l’outdoor plus développée qu’ici. Mais à Montréal, ça bouge vite. Il y a déjà 18 salles. C’est une ville qui se développe. Je suis arrivé par hasard et je m’y plais vraiment bien. Je suis arrivé en tant qu’ouvreur et depuis un an je suis chef ouvreur à Beta Bloc Montréal Dorval.”

SNAP : Quels sont les points forts et les points faibles de ce métier ?
Victor : “Dans ma situation, il n’y a pas beaucoup de points faibles. Au début, les salaires étaient relativement bas, mais finalement le métier s’est rapidement développé. De plus, il faut faire attention à ne pas se blesser, surtout quand on ouvre 5 jours par semaine. En ce qui concerne les points forts, c’est un métier créatif. Il y a une certaine liberté sur le produit final, sur la façon dont tu veux faire grimper les gens, dont tu apprends aux gens ! C’est le plaisir de faire grimper les gens à la base. De plus, j’ouvre dans plusieurs salles ce qui diversifie les rencontres et me permet de découvrir d’autres façons de travailler.”
SNAP : Est-ce qu’il y a des contraintes imposées par les salles ?
Victor : “Il faut suivre la vision du chef ouvreur. Depuis que je suis passé chef ouvreur, j’ai presque carte blanche. On discute seulement avec la salle de la répartition des niveaux d’ouvertures. En termes de commandes de prises, de couleurs, d’ouvertures, j’ai beaucoup de liberté.”
SNAP : Comment te décides-tu pour les marques de prises d'escalade ?
Victor : “ Je ne suis pas spécialement attaché à une marque. Je pense que chez tout le monde il y a des trucs très bien selon l’utilité que je veux en faire. J’aime profondément les mouvements à la base, j’ai appris à aimer faire un peu de design. Je n’étais pas prédestiné à la base mais j’y prends beaucoup de plaisir. J’aime tout ce qui est gestuel, les préhensions ouvertes, dynamiques. Je vais choisir des shapes épurées, très simples avec des préhensions définies, plutôt que des prises qui ressemblent à des roches. J’aime la gestuelle de compétition. J’essaie aussi d’être polyvalent et d’avoir de la diversité pour les clients.”

SNAP : As-tu essayé Snap holds ?
Victor : "J'ai été très surpris par les Snap Holds. Yoris a vraiment poussé toutes les formes au maximum de leur potentiel."
SNAP : Est-ce qu’il y a des projets à long terme qui te font rêver ?
Victor : “J’aimerais voyager pour ouvrir. Visiter quelques pays pour découvrir, pour ouvrir des compétitions, pour voir ce qu’il se passe autour de nous, pour rencontrer des gens, d’autres cultures, d’autres grimpeurs… J’aimerais pouvoir ouvrir partout dans le monde. Aller ouvrir en Australie, aux Etats-Unis, au Canada… à travers plusieurs pays. Je suis très curieux d’aller ouvrir sur les îles (endroits beaux à visiter par exemple Hawaï, Nouméa, chez les copains qui ont du soleil). L’Australie est assez inspirante, l’Amérique du Sud, les Etats-Unis, le Japon… C’est vraiment des endroits que je veux aller voir avant d’arrêter ma carrière de route setter.”
SNAP : Comment est-ce que tu as amélioré ton niveau en grimpe indoor ? As-tu des conseils à donner aux débutants ?
Victor : “Mon histoire est particulière car j’ai eu la chance de grimper avec Julien qui est très fort. Il m’a beaucoup appris techniquement. En 8 mois, je faisais du 7C à Fontainebleau. J’étais déjà bien sportif à la base. Je n’ai pas eu besoin de travailler super fort mais j’ai directement grimpé 6 jours par semaine 2 fois par jour et j’ai eu la chance de ne pas me blesser. Il faut écouter son corps pour éviter les blessures, écouter le plaisir plus que la performance, être curieux de tous les styles, de tout ce qui se fait ailleurs. Ça m’a beaucoup aidé ! J’ai toujours été curieux de pourquoi je n’y arrivais pas, j’ai toujours essayé de comprendre la gestuelle. Je suis tombé amoureux de ce sport. Essayer d’écouter des gens plus expérimentés, c’est vraiment ça qui aide. J’arrive à me pousser au cul pour grimper plus fort. Je n’ai jamais été un grimpeur très fort et ce n’est pas forcément ce que je recherche. Mon max c’est 8A/8A+, je ne ferai sûrement jamais de 8C. Ce que j’aime c’est pouvoir grimper dans n’importe quel style, n’importe quel secteur.”
Clément Lechaptois, l'acharné de la roche
A 28 ans, Clément s’inscrit dans les meilleurs bloqueurs outdoor français. L’adepte des croix dans le 8b et dans le 8c nous a toujours intrigué. Quel est son mode de vie ? Comment réussit-on à concilier vie professionnelle et passion quand on est un acharné du caillou? Retour sur une journée avec Clément.
C’est dans les Hautes-Alpes, proche d’Annecy que nous avons rencontré Clément. La journée commence par un check météo de la semaine, comme tous les lundis matins. En fonction des moments de pluie, Clément module son emploi du temps. Aujourd’hui grand soleil, on commencera par une matinée boulot avant d’aller se faire plaisir en forêt.
“Souvent je bosse le matin, puis je grimpe l’aprem et je fais un entrainement le soir.”

Don’t get too greedy, 8B, Rocky Mountain National Park ©Marine Thevenet
SNAP : Ton boulot c’est quoi ? Tu arrives à vivre de l’escalade ou tu as une activité pro à côté ?
Clément : “En escalade je dirais que je suis semi-pro, une partie des revenus vient des sponsors et je suis aussi ouvreur indépendant. Même si je n’ouvre pas énormément, c’est un métier de création qui me plaît bien, un milieu agréable. J’ouvre pour des équipes nationales et pour des compétitions.
En parallèle, comme j’adore l’entrainement et que je suis ingénieur mécanique, j’ai décidé de créer un outil innovant d’entrainement qui permet de concentrer les données scientifiques réelles d’un entraînement et de les rendre accessible aux grimpeurs. C’est un outil dédié plutôt aux salles de grimpe, et on est en train de développer une seconde Smartboard qui s’orientera pour les particuliers avec mes associés.”
Après une matinée studieuse, on se dirige vers le secteur où Clément s’entraine en ce moment, à environ une heure de route.
“Le rythme idéal c’est d’avoir deux demi journées de grimpe dehors, ou de juste aller explorer.”

TopNotch, 8b, Rocky Mountain National Park
SNAP : Explorer c’est à dire ?
Clément : “Ma passion c’est de développer nouveaux secteurs, d’ouvrir des blocs en extérieur. Très tôt, j’ai fait le choix de sacrifier la compèt pour partir dehors. Depuis plus de quatre ans, j’essaie de produire belles photos et vidéos et de rendre cette discipline accessible, pour inspirer et montrer les beaux endroits où on peut aller en grimpe. Donner envie aux gens d’y aller.”
SNAP : Comment choisis-tu tes projets ?
Clément : “L’aspect qui me motive toujours dans la quête de nouveaux blocs c’est l’esthétique: formes, prises, mouvements… J’aime pas particulièrement grimper à côté d’une usine, j’aime bien être dans des beaux endroits.”
SNAP : Comment on fait pour trouver des beaux endroits ?
Clément : “C’est beaucoup de bouche à oreille, ça peut même être avec des pratiquants d’autres sports, les gars qui courent vont explorer beaucoup plus loin que ce qu’on peut faire dans la grimpe. Par exemple Le Grand Sablat a été trouvé par des skieurs ! C’est cool de discuter avec des gens en montagne, de regarder des vidéos… Je fouille beaucoup sur Google Earth, je lis des cartes IGN et je vais marcher. Parfois je trouve des pépites au bord de la route au moment où je m’y attends le moins. Le fait d’ouvrir des blocs n’est pas très naturel pour les gens, en général ils arrivent sur un spot, regardent topo et se limitent à l’existant, mais parfois c’est juste à côté d’un bloc, et personne ne l’avait encore remarqué !
Il m’est arrivé d’ouvrir des 7a de fou , parfois un peu haut pas toujours accessible et de tomber dessus par hasard. Au fur et à mesure tu vois de plus en plus de lignes apparaitre.”
La session grimpe s’attarde comme presque toujours avec cet acharné de la roche… heureusement qu’on avait pris les frontales !

Dreamtime, 8B+, Cresciano